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lundi 4 juin 2018

OLMAZ DİYENLERE

supporters et Gouvernance des cLubs
Sans doute est-ce le rêve de la plupart des supporters de football : « posséder » une part de leur club de cœur. Mais un « fan » n’est ni un consommateur, ni un investisseur comme un autre. Cet inves- tissement n’aurait pas pour but la recherche de rendement mais répondrait plutôt à la « passion »154. Dans notre enquête sur le « supportérisme »155, 85 % des enquêtés commentaient les matchs en disant « on a gagné » lorsque leur club était vainqueur et 83 % étaient favorables au fait que se développent en France des formes de « participation » des supporters à la « gouvernance » des clubs. Cette volonté peut apparaître quelque peu anachronique dans le contexte économique actuel décrit précédemment (cf. chapitre 1) où la plu- part des clubs sont maintenant possédés par de riches propriétaires. Mais peut-être est-ce aussi une réaction à cette tendance, les suppor- ters se sentant dépossédés de leur équipe de football ?
154. J. Baudrillard, Le système des objets, 1968.
155. L. Arrondel et R. Duhautois, « Grande enquête sur le supportérisme », 
mimeo, 2016.
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Il existe déjà des formes de participation des supporters à la gou- vernance de certains clubs de football. Cette participation dépend des statuts des clubs professionnels.
En Espagne, il existe des Socios dans quatre clubs dont nous avons déjà parlé dans le chapitre 1.
En Angleterre, depuis le début des années 1990 et la création de la Premier League, des mouvements de supporters revendiquent une place dans les clubs. Le premier trust anglais fut créé à Northampton Town en janvier 1992 au moment, comme c’est souvent le cas, de la faillite du club. En 2000, le gouvernement du Royaume-Uni a financé la création de Supporter Direct, un organisme chargé de défendre le rôle des fans auprès des clubs qu’ils supportent. Il existe aujourd’hui 170 Supporter Trusts au Royaume-Uni, tous n’ayant cependant pas de représentation au sein des clubs. Ces trusts sont susceptibles de racheter des actions de leur équipe et peuvent dans certains cas être actionnaire majoritaire. C’est le cas depuis 2013 du club de Portsmouth : suite à son redressement judiciaire, l’équipe a été reprise par la « Pompey Supporters Trust » (crée en 2009) regroupant 2 300 fans qui ont injecté près de 2,5 millions de livres sterling pour en prendre le contrôle. Aujourd’hui, ce trust est l’actionnaire principal du club, propriétaire de 51 % des parts. À l’issue de la saison 2016-2017, le club est promu en Football League One (troisième division anglaise). Au sein de l’élite de la Premier League, le club gallois de Swansea appartient également en partie à ses supporters par l’intermédiaire du Swansea City Sup- porters’ Trust, association détenant 21,1 % du capital social du club, capital qu’il a conservé lors du rachat du Swansea City Asso- ciation Football Club par un consortium américain en 2016 (pour 100 millions de livres sterling). Là encore, les supporters ont pu entrer au capital en 2001, période où l’équipe jouait en 4e division
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anglaise. S. Szymanski156 cite le trust de Swansea comme exemple particulièrement réussi d’une participation des supporters à la gouvernance d’un club (renégociation de la dette, recrutement de dirigeants compétents, engagement des propriétaires d’investir dans le club, lobbying pour la construction d’un stade, recrutement de grands entraîneurs, motivation des supporters pour venir au stade) puisque Swansea a rejoint la Premier League en 2011 pour ne plus la quitter depuis. En 2010 les supporters d’Arsenal ont été les pre- miers à se regrouper pour acheter collectivement des actions de leur club par l’intermédiaire d’une association « Arsenal Fanshare Society Limited ». Sur les 62 117 actions disponibles, la société en détient aujourd’hui 116, soit environ 0,2 % du capital, ce qui en fait le troisième actionnaire du club. Chaque action qui vaut aujourd’hui environ 14 000 livres sterling est divisée en 100 parts et un tirage au sort est organisé pour désigner les sociétaires qui iront siéger au conseil d’administration d’Arsenal. Les difficultés rencontrées pour acquérir de nouvelles actions (97 % du capital est détenu par les deux actionnaires principaux) ont mis cependant fin au processus d’acquisition début 2015.
En Allemagne, la règle du 50+1 décrite dans le chapitre 1 garantit que les associations à but non lucratif sont majoritaires. Cette règle limite aussi l’entrée d’investisseurs dans les clubs allemands. Ce statut a permis à certaines associations de supporters comme à Hambourg (50 000 adhérents) d’agir directement sur la gestion du club (dans ce cas pas toujours à bon escient). Ainsi, 75 % des actions du Bayern de Munich sont détenues par l’association FC Bayern Munich e.V qui regroupe plus de 187 000 membres. Mais il est néanmoins très rare de voir des groupes de supporters représentés au cœur des clubs allemands comme les conseils de surveillance.
156. S. Szymanski, Money and Soccer, 2015.
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En France, la place des supporters dans la gouvernance des clubs reste très limitée, voire absente. Quelques initiatives ont pourtant vu le jour récemment. Depuis 2008, la Fédération des Supporters du Havre Athletic Club qui regroupe les associations des supporters du club, est actionnaire de la SASP HAC. En 2013, des supporters du FC Nantes de l’association A la Nantaise ont créé une société par action simplifiée (SAS) destinée à entrer dans le capital du club si ce dernier décidait de l’ouvrir. En 2017, B. Desplas, président de l’En Avant Guingamp a ouvert le capital aux supporters pour que ceux- ci, par l’intermédiaire d’une association Le Club des Kalons EAG, deviennent actionnaires du club. Cette opération a rencontré un fort succès populaire puisque plus de 15 000 supporters ont versé 40 euros pour devenir membre de l’association. D’autres présidents se sont prononcés en faveur de l’actionnariat populaire comme par exemple B. Caïazzo, le président du comité de surveillance de l’AS Saint-Étienne : « Notre projet, c’est que le supporter soit actionnaire en direct. » Au moment du dépôt de bilan de la SASP du SC Bastia et la rétrogradation du club en National 3 (cinquième division), une association, le Socios Étoile Club Bastiais (SECB), a lancé une campagne de crowdfunding afin que les supporters puissent devenir membres de l’association et aider le Sporting : 6 000 fans ont versé 50 euros en 2017. À Marseille, le Massilia Socios Club a été créé en 2016 pour envisager la participation des supporters au capital de l’Olympique de Marseille.
Malgré ces quelques initiatives, force est néanmoins de constater qu’en France, pour l’instant, les supporters payent leur place au stade mais n’ont pas de siège aux clubs.

Source: L' Argent du Football - Luc Arrondel Richard Duhautois (CEPREMAP)

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