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jeudi 7 septembre 2017

TRANSFERTS : LE BİLAN

Analyse du marché des transferts :
tracer l’argent (2010-2017)
Drs Raffaele Poli, Loïc Ravenel et Roger Besson
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1. Introduction
L’étude du marché des transferts constitue un des principaux axes de recherche de l’Observatoire du football CIES. Ce rapport analyse les transactions payantes intervenues depuis 2010 ayant impliqué des équipes des cinq grands championnats européens : Premier League anglaise, Liga espagnole, Bundesliga allemande, Serie A italienne et Ligue 1 française.
Le premier chapitre étudie dans une perspective historique les sommes investies en indemnités de transfert. Le deuxième présente les bilans financiers du dernier mercato à l’échelle des clubs, ainsi que les principaux soldes monétaires entre ligues. Enfin, le troisième chapitre analyse les opérations de transfert du point de vue de l’écart entre montants investis et sommes estimées par l’algorithme que nous avons développé*.
[* À ce propos, voir la note de recherche Comment évaluer la valeur de transfert d’un joueur ?]
2. Sommes dépensées
Bien que les chiffres officiels des montants investis en indemnités de transfert restent le plus souvent confidentiels, le suivi des opérations par médias interposés permet d’appréhender assez fiablement la réalité. Les données publiées dans ce rapport incluent les indemnités de transfert fixes, les éventuels bonus, ainsi que les sommes versées dans le cadre de prêts payants.
Depuis 2010, les sommes de transfert dépensées par les clubs du big-5 ont fortement augmenté. Pour la cinquième année consécutive, un record a été enregistré en 2017  : 5,9 milliards €*. Il s’agit d’une augmentation de 41% par rapport à l’année précédente. Si on ne prend en compte que les transferts de l’été, l’accroissement a été de 38% : de 3,7 à 5,1 milliards €.
[* Les sommes de transfert négociées dans le cadre de prêts avec obligation d’achat sont aussi incluses dans le décompte.]
Figure 1 : indemnités de transfert engagées par les clubs du big-5, milliards € (2010-2017)
À l’image des années précédentes, en été 2017, les clubs de Premier League ont engagé les montants les plus élevés : 1,55 milliards € en indemnités fixes et 220 millions € en payements conditionnels. En moyenne, un club de première division anglaise a investi 89 millions € dans le recrutement de nouveaux joueurs. Dans les autres championnats analysés, ce chiffre varie entre 55 millions € (Serie A italienne) et 34 millions € (Liga espagnole).
Figure 2 : indemnités de transfert engagées par les clubs du big-5, par ligue (été 2017)
La part des dépenses des clubs de Premier League par rapport aux indemnités de transfert payées par l’ensemble des clubs du big-5 a toujours été supérieure à 30% lors de la période analysée. La diminution observée en 2017 reflète en premier lieu les investissements très importants consentis par Paris St-Germain (418 millions €) et Milan (250 millions €).
Figure 3 : répartition des indemnités de transfert engagées par les clubs du big-5, par ligue (2010-2017)
L’analyse spatiale des sommes investies par les équipes du big-5 durant l’été 2017 montre que la plupart de l’argent reste à l’intérieur de ces championnats : 3,7 milliards € (71% du total). Pourtant, seulement 52% des recrutements payants effectués par des équipes du big-5 ont concerné des joueurs sous contrat avec des clubs de ces mêmes ligues. Ce déséquilibre s’explique du fait que les transferts les plus chers interviennent entre équipes du big-5. Les cas de Neymar, Mbappé et Dembélé sont en ce sens emblématiques.
Figure 4 : récipiendaires des indemnités de transfert engagées par les clubs du big-5 (été 2017)
Plutôt que de remettre en cause l’utilité du système de transfert, comme notamment argumenté par la FIFPro, notre analyse plaide pour le renforcement des mécanismes de redistribution. L’augmentation des indemnités à verser aux clubs formateurs, ainsi que l’accroissement et la généralisation des contributions de solidarité telles que prévues par la FIFA pour les transferts internationaux constituent autant de mesures qui permettraient d’améliorer la donne.
3. Bilans financiers
Au-delà des sommes dépensées, il est intéressant d’étudier le bilan net des opérations de transfert. Au total, 41 clubs du big-5 affichent un solde financier positif pour les mutations de joueurs réalisées en été 2017. Le bilan le plus positif en absolu a été observé pour Monaco : +289 millions € (394 millions € encaissés et 105 millions € dépensés). À l’opposé, il y a Paris St-Germain : -343 millions €.
Figure 5 : bilan financier des transferts, équipes du big-5 (été 2017), en millions €
L’analyse par ligue met en exergue le cas extrême de la Premier League, qui affiche un bilan nettement déficitaire (-835 millions €). Seules cinq équipes de la première division anglaise ont encaissé plus d’argent en indemnités de transfert que les montants engagés par le recrutement de nouveaux joueurs. À l’opposé du championnat anglais, la Liga espagnole présente un solde monétaire légèrement positif (+9 millions €). Ce résultat est en grande partie lié au cas du Real Madrid (+47 millions €).
Figure 6 : bilan financier des transferts, ligues du big-5 (été 2017), en millions €
L’analyse spatiale des bilans financiers des transferts internationaux ayant concerné des équipes du big-5 confirme le rôle moteur de la Premier League dans la structuration du marché. Cinq des sept relations internationales avec les soldes monétaires les plus importants concernent la première division anglaise : -259 millions € vis-à-vis de la France, -112 millions € vis-à-vis de l’Espagne, -108 millions € vis-à-vis de l’Italie, -105 millions € vis-à-vis du Portugal et -99 millions € vis-à-vis des Pays-Bas.
Figure 7 : soldes monétaires des transferts internationaux de l’été 2017 ayant impliqué les clubs du big-5 (soldes ≥ 25 millions €)
En ne prenant en compte que les équipes présentant un solde positif pour les transferts ayant impliqué des clubs du big-5 lors de l’été 2017, il apparaît que les principaux bénéficiaires se situent au sein de ces mêmes championnats. Les 41 équipes du big-5 bénéficiaires totalisent un bilan positif de 989 millions €. La valeur la plus élevée par ligue a été enregistrée pour la Ligue 1  : +436 millions € (dont les deux tiers pour Monaco).
Figure 8 : bénéficiaires des opérations de transfert ayant impliqué des clubs du big-5, par catégorie de ligues (été 2017), en millions €
Les clubs extérieurs au big-5 présentant un bilan positif pour les transferts effectués avec les équipes des cinq grands championnats se situent surtout dans d’autres pays de l’UEFA (en particulier au Portugal, aux Pays-Bas et en Belgique), dans la deuxième division anglaise (en grande partie grâce aux transferts vers la Premier League), ainsi qu’au Brésil.
4. Opérations de transfert
L’Observatoire du football CIES est notamment reconnu pour sa capacité à estimer sur une base scientifique la valeur de transfert des footballeurs professionnels. Ce chapitre compare les montants investis pour le transfert de joueurs présents dans le big-5 à l’issue de la saison 2016/17 avec les « justes » prix calculés grâce à notre algorithme. La forte corrélation entre sommes payées et estimées confirme la robustesse de notre approche et son fort pouvoir prédictif.
Figure 9 : corrélation entre montants payés et sommes estimées pour les joueurs big-5 (transferts de l’été 2017)
Comme d’habitude, un écart négatif a été mesuré entre prix payés et valeurs estimées. Au total, les premiers ont été de 30% inférieurs aux deuxièmes. Il s’agit de la plus forte différence observée depuis la mise au point de l’algorithme. Ce résultat reflète l’accélération de l’inflation sur le marché des transferts.
Selon l’algorithme développé, le transfert le plus sur-payé en valeur absolue a été celui de Kylian Mbappé de Monaco à Paris St-Germain  : +87.4 millions € entre montant annoncé (avec bonus) et somme estimée. Inversement, la meilleure affaire d’un point de vue financier a été réalisée par Liverpool pour le recrutement de Mohammed Salah (-19.4 millions €).
Figure 10 : plus forts écarts entre prix payés et valeurs estimées (été 2017)
5. Conclusion
Ce rapport met en exergue l’inflation des sommes de transfert pour le recrutement de joueurs sous contrat avec des équipes faisant partie des cinq grands championnats européens. La sous-estimation moyenne des prix par rapport aux valeurs prédites sur la base de notre algorithme et l’augmentation globale des indemnités de transfert payées par les équipes du big-5 sont autant d’indicateurs illustrant le processus d’inflation.
La mondialisation de l’intérêt pour le football en général et pour les championnats les plus compétitifs de manière plus spécifique laissent présager une poursuite de l’inflation des coûts sur le marché des transferts. À court et moyen terme, les équipes des meilleures ligues devraient être en mesure d’accroître leur chiffre d’affaire. Ce constat est d’autant plus vrai pour les clubs les plus puissants.
À plus long terme, dans un contexte où le changement des modes de consommation renforcera la baisse des audiences télévisuelles, le plus gros défi résidera dans la capacité des clubs et des ligues à diversifier encore davantage les sources de monétisation du spectacle sportif. Dans tous les cas, pour les cinq prochaines années, il y a fort à parier que des nouveaux records de dépenses sur le marché des transferts vont être progressivement établis.



Rapport mensuel n°27 - Septembre 2017 - Analyse du marché des transferts

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